Croissance verte : nécessaire mais insuffisante

Tout d’abord, peut-on définir, en quelques mots, les vrais enjeux climatiques et environnementaux en question ?

La crise de la biodiversité, à court terme, est plus aiguë que celle du climat même si les deux se combinent. Mais on se concentre beaucoup sur ce dernier, pour deux raisons : le climat nous affecte plus directement et il est lié aux questions d’énergies. On ne peut plus faire de l’énergie sans faire de climat (le charbon est moins cher mais trop polluant !), mais on peut faire du climat sans énergie (l’adaptation, par exemple). L’énergie est un enjeu que l’on peut opérationnaliser, maîtriser plus ou moins bien, mesurer avec des critères objectifs, alors que la crise de la biodiversité, on ne sait pas trop comment faire pour l’endiguer : comment, concrètement, participer à la restauration d’une espèce, d’un milieu ? 

 

Au niveau de l’entreprise et de sa gouvernance, la considération pour le climat était une option autrefois. C’est une évidence aujourd’hui. À quel moment avez-vous observé ce changement de paradigme ? 

C’est à partir de 2012-2015 que j’ai constaté un changement, avec des entreprises qui souhaitaient s’engager et prendre en compte le facteur humain. Des entrepreneurs avaient également un désir d’innovation. Avant, les services RSE étaient directement associés aux services communication, mais ensuite, ils ont pris de l’importance en matière de budget, de RH et de pouvoir d’influence. Certaines entreprises ont su qu’il fallait agir sur la gouvernance, les fournisseurs, voire, les clients. Cette transition est en partie forcée par la réglementation mais aussi par la concurrence mais aussi consentie et désirée pour des raisons écologiques. Comme me l’ont dit certains chefs d’entreprises : «J’ai des enfants et l’avenir fait peur». Mais même lorsque les changements sont désirés, il peut y avoir des freins internes, liés justement à la gouvernance et au management déjà en place.   Par exemple, pour rentrer dans une démarche de transition, il faut avoir une culture de l’innovation avec une condition essentielle dans les collectivités territoriales, comme dans les entreprises : le droit à l’erreur. Si à chaque fois que l’on tente d’expérimenter et qu’on échoue on se fait mal évaluer par la hiérarchie, on arrête d’innover.

 

Comment la lutte contre le réchauffement climatique conditionne-t-elle l’activité même de l’entreprise ?  

Si on est opérateur d’énergie, les impacts du changement climatique sur la montée des eaux ou le contraire, l’assèchement des rivières et les canicules auront des impacts sur la distribution et sur la production. C’est la même chose pour la production agricole. Mais pour le tourisme, c’est plus varié : le nombre de nuitées en mer diminue au profit d’une augmentation de nuitées en montagne, par exemple. C’est toute la question de la capacité d’adaptation de ces acteurs aux nouvelles conditions évolutives qui est soulevée. Et c’est -très complexe. 

 

Qui peut imposer des contraintes aux entreprises privées ? 

L’Union européenne a un effet structurant, encadrant qui est très important mais il ne faut pas oublier les autres entreprises, concurrentes ! Une multinationale qui impose à tous ces fournisseurs quelques conditions environnementales a un impact fort. En tant que fournisseur, pour ne pas perdre une multinationale comme client, on s’aligne avec ses exigences. Mais cette pression qui entraîne la capacité à imposer des conditions n’est pas assez utilisée. Et pourtant c’est un vrai levier.  

 

Peut-on parler de « sobriété économique », de « sobriété écologique » ? 

J’ai beaucoup de problèmes avec ce mot parce qu’on l’utilise n’importe comment. La quasi-totalité des acteurs ne réalisent pas ce qu’ils demandent en matière de charge cognitive, de poids mental, de ce que cela fait sur le quotidien que de devoir s’observer, changer ses pratiques, se pardonner quand on échoue et.. recommencer ! La sobriété est au minimum un changement de comportement et idéalement un changement de mode de vie. Qui veut devenir végétarien, qui veut réduire son espace de vie, sa consommation quotidienne ? La sobriété a un poids. Une grande partie de mes recherches tourne autour de cette question. Que veut dire la sobriété pour des entreprises, pour des familles, pour des ménages ou pour des collectivités territoriales ? Quand j’ai vu le gouvernement français dire que l’on avait atteint la sobriété cette année, en fait, il ne parlait pas de sobriété, il parlait de diminution de la consommation d’énergie, et ce n’est vraiment pas pareil. Si je fais des travaux de rénovation énergétique chez moi, je diminue ma consommation d’énergie, certes. Mais la sobriété, c’est changer ma façon de manger, de me déplacer, c’est acheter moins de vêtements, moins de gadgets. Ce qui m’inquiète, c’est que, ces prochaines années, on va devoir apprendre la sobriété de la consommation de l’eau. Avec les sécheresses, la diminution de la pluviométrie, il faudra nécessairement penser l’eau différemment. Ce qui ajoute une pression supplémentaire à celle déjà ressentie par tous. λ

Tribune : la fin est proche

 Le DRH est habitué à porter les mauvaises nouvelles de tous côtés. Aux candidats (« nous n’avons pas retenu votre candidature »), aux salariés (« nous allons devoir nous séparer »), aux dirigeants (« pour attirer les talents, faudra les payer plus que ça »). Il lui revient de les formuler le plus positivement possible, sans hypocrisie. Autant de compétences qui en font l’un des meilleurs ambassadeurs de la RSE dans l’entreprise.

La RSE est un sujet « people » par excellence. 

Elle est vectrice d’attractivité et de rétention. Elle s’incarne dans des projets individuels et collectifs. Elle soulève des questions de gestion des temps, de mobilité. Surtout, elle met en jeu la dialectique entre intérêt corporate, intérêt personnel et intérêt général, que l’on retrouve au cœur de la fonction RH.

Le DRH, agent de transformation culturelle

La responsabilité sociale et environnementale recouvre tout ce que l’entreprise peut faire en réponse aux malheurs de ce monde : précarité, pauvreté, réchauffement climatique…

L’environnement est le thème RSE sur lequel l’information, la prise de conscience, la culture partagée jouent le rôle le plus important. Mobilités douces, gestion des déchets, achats responsables, adaptation de l’offre, sobriété énergétique : l’efficacité de ces politiques dépend de leur appropriation par tous. La fonction RH est ici à l’œuvre via le recrutement, la marque employeur, l’intégration, le dialogue avec les salariés et le management sur ces questions.

Rappel : la guerre de Troie a bien eu lieu

Si l’entreprise veut projeter une image d’acteur sincère sur les questions RSE, elle doit s’engager et tenir ses promesses. Le DRH, souvent, joue un rôle difficile de VRP de l’image employeur, enthousiaste mais craignant d’être lâché par la troupe, trahi par la réalité de l’entreprise. Veut-il en plus se charger du rôle de prophète de malheur sur l’environnement ? J’ai envie de dire oui, n’ayez pas peur, allez-y. C’est le sens de l’Histoire.

Le DRH n’a rien à perdre à jouer les Cassandre de l’environnement. Car Cassandre, ne l’oublions pas, avait vu juste. Mais comme L’Iliade nous le rappelle, il ne suffit pas d’avoir raison… encore faut-il savoir convaincre. C’est là où le DRH doit être plus malin. Si Troie avait eu un bon DRH, l’histoire aurait sans doute été bien différente. λ

Essec : la RSE incubée

Quelles sont les principales missions du Laboratoire ? Elles concernent, pour la majeure partie d’entre elles, des travaux de recherche-action avec des partenaires, des organisations qui ont envie de comprendre leur impact social et souhaitent le mesurer. Notre vision, c’est que l’évaluation de l’impact social doit se faire à l’aide d’un outil de pilotage, tout comme […]

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Tribune : Pour une souveraineté stratégique : la raison d’être… d’un débat

En résumé : face à l’urgence planétaire et à la quête de sens, la politique a sommé les entreprises de manifester leur adoration de l’écosystème et de mettre en conformité leur marché avec cette injonction. Et ces dernières se sont oubliées dans une pratique mimétique. Chacun « agit pour accélérer la transition vers une économie neutre en […]

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Chartes, promesses, valeurs : les illusions perdues

« Nous vivons dans un monde où les funérailles sont plus importantes que la mort, le mariage est plus important que l’amour, l’apparence est plus importante que l’âme. Nous vivons dans une culture de l’emballage qui méprise le contenu », disait l’écrivain Eduardo Galeano. De ce monde des apparences, le monde de l’entreprise n’est hélas pas exclu, […]

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PUBLICIS : un engagement horizontal

Comment pourriez-­vous qualifier la politique environnementale de Publicis ? Comme une politique de précurseurs dans le domaine de la communication. Cela fait plus de quinze ans que nous avons mis en place un département RSE au niveau du groupe. Publicis travaillait alors de manière globale sans impliquer vraiment les agences. Dès 2013, devant cette transformation aujourd’hui […]

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La RSE : un grand bluff managérial ?

En 2021, l’éviction du PDG charismatique de Danone, Emmanuel Faber, sous la pression de fonds d’investissement, n’était pas juste un fait divers économique, une nouvelle conjoncturelle, une illustration des péripéties, des tribulations du jeune statut d’entreprise à mission. C’était une illustration parfaite des limites de la bonne volonté en entreprise, « instrument » qui se révèle insuffisant face à un réel de plus en plus complexe et inhospitalier pour les vœux pieux. Ce que j’ai alors nommé « l’effet Faber » ou les limites de la bonne volonté pour transformer les organisations, ne peut trouver meilleur terreau que la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

Est-il possible d’être responsable dans un management de marché ?

Tout choix managérial pleinement efficace a pour objectif de satisfaire les exigences du marché économique. De sa satisfaction découlent la rentabilité et la pérennité des entreprises. C’est un truisme de le dire.

Dès lors, les choix managériaux sont le fruit de combinaisons permettant à l’organisation de produire le modèle qui satisfait le marché économique à un instant T par le truchement de biens et/ou de services donnés. Ce modèle managérial n’a donc pas comme objectif premier d’être « responsable » mais d’être pleinement efficace pour satisfaire un besoin économique donné.

Sauf exception, dans les associations ou dans certains services publics, le choix managérial, loin d’être neutre, est dicté, volens nolens, par la décision de satisfaire le marché. Malgré l’offre exponentielle de modèles managériaux auréolés d’humanisme et de responsabilité, il serait bien naïf de penser que les choix de gouvernance sont dictés par la providence ou par la recherche du bien commun qui transcenderait toute considération autre.

Manager une entreprise est un acte politique !

Le management est donc loin d’être neutre comme nous aimons à le penser, car manager, c’est travailler le divers, lequel n’a jamais été aussi complexe : efficacité à court terme vs soutenabilité, citoyen vs consommateur, cœur vs raison, intuition vs pensée, préservation de l’environnement vs croissance…

Manager, c’est agir politiquement : le manager doit chercher à « préserver le sens des ensembles » pour satisfaire des objectifs de différentes natures, souvent contradictoires dans un commerce temporel donné : se situer hic et nunc, en se projetant à partir du passé tout en donnant des gages au futur.

Ainsi, un management absolument efficace d’une entreprise est antinomique avec une responsabilité sociale. Le maximum d’efficacité justifie le minimum de responsabilité et même le minimum de liberté, comme l’avait bien vu Bernard Charbonneau, comparse de Jacques Ellul et écologiste avant l’heure. La RSE met en exergue la tension entre toute velléité de responsabilisation et le prix qui va avec. La responsabilité a toujours un prix. Il est illusoire de penser qu’on puisse être responsable à peu de frais, c’est une vue de l’esprit.

Ainsi, on peut diriger efficacement, à partir de choix, d’actions efficaces qui produisent l’effet et les résultats attendus, sans pour autant le faire convenablement – c’est-à-dire d’une manière soutenable qui convienne aux personnes et à la société.

L’effet Faber est-il inéluctable ?

Pour éviter de « bricoler dans l’incurable » et d’être pris dans cet effet Faber, il est nécessaire de comprendre qu’agir avec responsabilité et humanité ne se décrète pas dans une organisation : la finalité d’une organisation n’est ni le vrai, ni le beau, ni le bien, mais la capacité à exécuter efficacement l’ordre reçu. Autrement dit, il n’y a pas de sagesse spontanée dans une organisation qui serait la traduction d’une force irrésistible de responsabilité ou d’humanité. La sagesse organisationnelle n’existe pas : seul un homme dont les idéaux surpassent les instincts (Paul Valery) et conscient des risques qu’il prend peut être sage, car il y a toujours un prix à payer.

En outre, il est nécessaire de sortir du mythe de la solution qui permettrait d’être « responsable ». On n’apporte une solution qu’à un problème technique ou mathématique. Seul un « arrangement » est de mise, c’est-à-dire toute action permettant un compromis acceptable eu égard aux données du « problème », qui respecte les parties prenantes et qui ne sacrifie pas le futur pour le présent. L’arrangement, c’est la concrétisation de l’éthique de la non-puissance dont parlait Jacques Ellul.

Enfin, la mise en pratique d’une éthique de la non-puissance nécessite un changement des représentations et une éducation sérieuse. Tant que dans les lieux de socialisation nous continuerons de faire comme si, disait Karl Kraus, Dieu avait d’abord créé le producteur, puis le consommateur, et après l’Homme, le management continuera d’être une technique de pouvoir, avec l’injonction de ne décider qu’en fonction des intérêts de ce dernier. Sans une hominisation des femmes et des hommes, nous continuerons de nourrir l’illusion qu’une solution technique (statut à mission, comptabilité inclusive, système de bonus-malus…), aussi pertinente et utile fût-elle, pourrait à elle seule permettre de répondre aux enjeux de responsabilisation sociale et environnementale des entreprises. λ

Quand le climat dessine sa fresque en entreprise

Lorsqu’il pense La Fresque du climat, en 2018, le Nantais Cédric Ringenbach, ingénieur, conférencier et enseignant spécialisé dans le changement climatique, se donne un objectif ambitieux : accélérer la compréhension des enjeux climatiques au niveau mondial pour contribuer à déclencher les bascules nécessaires à la préservation de la planète et du vivant. S’appuyant sur le postulat que « pour agir, il faut comprendre », il conçoit un jeu de cartes pédagogique, nourri d’informations scientifiques vulgarisées du Giec (Groupe international des experts pour le climat), pour inviter les « joueurs » à dessiner ensemble, durant trois heures, un cheminement graphique qui part du problème, expose ses causes et dégage des solutions et des pistes d’action générées de façon collective par les participants eux-mêmes. Cinq ans plus tard, 1 million de personnes, citoyens lambda, étudiants ou encore organisations et entreprises, ont participé à ce jeu climatique pédagogique et ludique colporté dans 130 pays. La part des entreprises représente à elle seule près de 35 % des participants.

« Une claque » fédératrice

« Dès ses débuts, La Fresque du climat a été sollicitée par les entreprises qui ont des stratégies de développement durable. Elle est perçue comme un outil de référence qui permet aux collaborateurs de s’approprier le défi de l’urgence climatique », expose Thomas Dayraud, directeur offres et programme au sein de l’association La Fresque du climat. Une sensibilisation « choc » qui fait l’effet « d’une claque » et qui a le don de provoquer l’effet recherché par les dirigeants. « Pour s’inscrire dans la transition, les entreprises ont besoin d’embarquer leur staff et leurs collaborateurs avec elles pour les informer des changements qu’elles vont mettre en place, mais aussi les impliquer. C’est une étape essentielle. » EDF, Decathlon, La Poste, Saint-Gobain, Airbus… Autant de groupes qui l’ont compris. Les deux premiers ont ainsi formé quelque 70 000 de leurs collaborateurs aux enjeux climatiques par le biais de La Fresque du climat, sur un rythme moyen d’une fresque animée par mois sur deux ans, en fonction de la taille de l’entreprise.

Des référents « fresqueurs » au sein de l’entreprise

Pour permettre un déploiement à grande échelle, l’association forme un collaborateur interne à l’entreprise qui devient l’animateur et le référent officiel Fresque du climat au sein de la structure. « Ces dynamiques permettent au jeu de pouvoir se déployer dans différents pays grâce aux branches internationales des groupes, comme Saint-Gobain, par exemple, qui a des équipes au Brésil », détaille Thomas Dayraud, précisant que 75 % des entreprises du CAC 40 ont aujourd’hui recours à cet outil pour impliquer leurs équipes dans la transition. « Chaque mois nous sommes sollicités par des centaines d’entreprises de toutes tailles, de plus en plus à l’international. En 2022, la proportion des demandes était de 90 % pour la France et de 10 % pour l’étranger. Cette année, on est à 80 % (20 % pour l’étranger). Dans les années à venir, la France ne sera plus qu’un pays parmi les autres », projette le responsable, dont l’association est aujourd’hui implantée en Suisse, au Royaume-Uni, en Espagne et en Belgique. Dans les mois et les années qui viennent, La Fresque du climat vise un déploiement massif de son dispositif dans d’autres pays (notamment aux États-Unis et au Canada), en renforçant l’outillage du jeu.

 

Trois questions à Emmanuel Delannoy, cocréateur de la Fresque de l’Économie régénératrice.

Comment l’idée de créer une Fresque autour de l’économie vous est-elle venue ?

L’idée était de concevoir une fresque tournée vers une économie qui inclue les grands principes de la permaculture. Soit une économie qui intègre les communs, c’est-à-dire tout ce dont l’entreprise bénéficie dans son fonctionnement mais qui ne lui appartient pas.

Quels sont les grands axes de cette fresque ?

Elle se déroule en quatre parties. La première vise à présenter les cycles de vie des produits et à démontrer que l’économie d’aujourd’hui n’est pas circulaire. La seconde, les systèmes dans lesquels l’entreprise s’insère, les communs sociaux et environnementaux. La troisième dresse un arbre des causes qui permet de soulever ce qui ne va pas dans l’économie actuelle et de mettre à jour le pourquoi. Enfin, la quatrième présente les piliers de l’économie régénératrice et ses intentions, ses référentiels et ses outils et méthodes, en se basant sur le principe du respect du vivant, en remettant les communs environnementaux, absents de l’économie actuelle, au centre.

Quel est l’objectif de cette fresque ?

Pour l’entreprise, elle est un premier pas vers la régénération. Le but est qu’elle lui donne l’envie de mettre en place ce type d’économie, alternative et complémentaire à l’économie capitalistique, dans son système de gouvernance et son modèle économique.

 

Comment réussir à se déconnecter pendant les vacances ?

Il est primordial d’arriver à lever le pied pendant ses vacances, pour se ressourcer et préserver son équilibre de vie. Chaque salarié peut faire valoir son droit à la déconnexion (article L2242-17 du Code du travail). Rencontre avec Valérie Lacoste, Directrice de la practice Technologies et Digital au sein du groupe Oasys & cie.
Face à la frontière poreuse entre vie professionnelle et vie privée, comment arriver à se déconnecter ?
La connexion permanente avec l’entreprise est un phénomène bien documenté, et ce sentiment de sur-sollicitation est amplifié lorsque l’on s’éloigne physiquement de son lieu de travail. Ainsi, en vacances, l’une des principales difficultés à se déconnecter réside dans l’acceptation de ne pas être informé de tout. Il est important d’intégrer que l’information peut être partagée au sein de son équipe, en privilégiant la délégation et le partage des responsabilités. Une fois que ce prérequis est intégré, le travailleur peut alors se permettre de faire le vide pour se détendre pleinement. Pour une régénération complète, il est essentiel de faire le plein d’énergie et de nouvelles ressources. Deux éléments clés contribuent à cette régénération : l’aération et l’inspiration. L’aération consiste à briser les routines, à abandonner les habitudes pendant les vacances. L’inspiration, quant à elle, implique de lâcher prise et de s’ouvrir à la liberté et à la découverte.
En quoi la déconnexion durant les vacances peut venir alimenter les pratiques managériales ?
Durant cette période estivale, l’adoption d’une approche différente de la temporalité peut favoriser l’instauration de comportements propices au lâcher-prise et à une posture réfléchie dans la gestion quotidienne. En se déconnectant, les salariés laissent libre cours à leur imagination, leur créativité et leur sensibilité. Cette ouverture d’esprit peut créer de nouveaux espaces de découverte, de réflexion et de prise de décision. Par ailleurs, l’exploration de nouvelles activités sportives, créatives ou artistiques stimule l’audace et la spontanéité. Ces expériences renforcent leur capacité à adopter un style de management plus créatif, favorisant une acceptation plus marquée du risque.
Comment intégrer la déconnexion à sa routine professionnelle ?
Intégrer la déconnexion dans sa routine professionnelle est essentiel pour maintenir un équilibre sain entre vie personnelle et vie professionnelle. Il faut planifier et organiser des moments sacrés, des « bulles personnelles », où la déconnexion est privilégiée. Ces moments réguliers offrent l’occasion de réinitialiser son état d’esprit, de regagner de l’énergie et de trouver de nouvelles idées. Ensuite, la déconnexion peut s’intégrer naturellement dans son quotidien professionnel, pour veiller à établir un équilibre adéquat avec notre vie personnelle. Il est crucial de disposer de moments de déconnexion totale en dehors des heures de travail pour maintenir cet équilibre essentiel.
Quelques conseils pour se déconnecter ?
D’abord, il est utile de prévenir tous ces contacts internes et externes avant son départ en vacances pour régler les derniers sujets. Ils seront également au courant de vos dates d’absence et ne les perturberont pas, sans raisons urgentes. Dans le message automatique d’absence que vous aurez paramétré depuis votre boîte e-mail, précisez bien qui il est possible de contacter pendant votre période de congé. Bien entendu, cela veut dire que vous avez identifié auparavant cette personne et vous lui avez donné accès à toutes les informations nécessaires. Faites de même avec votre messagerie téléphonique et désactivez la fonction permettant de laisser un message. Désactivez également l’ensemble de vos notifications que cela soit celles des boîtes email ou whatsapp de plus en plus utilisé dans le monde professionnel. Ainsi, vous ne serez pas tenté de consulter les messages et d’intervenir. Si vous ne voulez pas vous tenir au courant de l’actualité, faites de même avec les applications des journaux professionnels. Se ressourcer, c’est aussi avoir l’esprit serein et peut-être que votre fonction ne vous permet pas de vous déconnecter totalement pendant plusieurs semaines. A ce moment-là, faites en sorte de traiter uniquement vos messages téléphoniques de la part de la personne qui vous remplace. Elle seule, jugera l’importance de vous déranger. Et enfin, profitez !

Trois sports atypiques à faire pendant sa pause déjeuner

Antistress, catalyseur d’estime, source de concentration… Le sport a plus d’un bénéfice pour les travailleurs. En tête des sports les plus pratiqués en France, selon un classement d’Europe 1 en 2022, c’est le football avec plus de 2,1 millions de licenciés, suivi par le tennis avec plus d’un million de licenciés (qui seront probablement devant leur télévision pour la finale de Roland-Garros dimanche), puis l’équitation et le basketball. Si selon la coach sportive Lucile Woodward, « tous les sports sont bénéfiques pour le corps et l’esprit », la pause déjeuner peut être le moment opportun pour briser la routine et tester des expériences atypiques entre collègues. Si vous ne savez pas encore quel sport pratiquer sur une journée de travail, voici trois exemples pour créer du lien, booster son moral et améliorer ses capacités cognitives.
 
Un cours de “puppy yoga”
Né aux Etats-Unis il y a plusieurs années, le “Puppy Yoga” a conquis de nombreux pays (Australie, le Canada, l’Angleterre) et arrive en France depuis quelques semaines. L’idée ? Une session de yoga accessible à tous niveaux (échauffements physiques, techniques de respiration, postures, étirement des muscles…) dans une salle à travers laquelle se balade une portée de chiots. Pauses acceptées, bien sûr, pour câlins et jeux à tout moment ! Proposées à Paris pour le moment, ces sessions d’une heure permettent aux chiots de moins de 8 semaines de sociabiliser avant d’être adoptés (ils sont accompagnés de leur éleveur). Les interactions avec les bébés chiens sont connues pour booster la sensation de bonne humeur et lutter contre le stress… Alors pour prolonger le plaisir, on peut aussi demander à son employeur de ramener son animal de compagnie au bureau !
 
De l’escalade
Hold’Up, Climb up, Arkose, Climb District, Endenwall… Si les salles d’escalade fleurissent depuis quelques années en France (pour grimpeurs débutants comme aguerris) c’est qu’il y a bien une raison, voire plusieurs… Cette pratique physique permet non seulement de développer ses muscles (bras, cuisses, dos, ceinture abdominale…), mais aussi de lutter contre la dépression (selon l’Université d’Erlangen-Nuremberg en Allemagne), de booster ses capacités de concentration, son sentiment d’efficacité personnelle et sa confiance en soi. Pratiqué à plusieurs, ce sport permet aussi renforcer les interactions sociales grâce aux encouragements et aux félicitations. D’autant plus de raisons d’y aller avec ses collègues – la reconnaissance au travail, et si cela passait aussi par les activités entre midi et deux ?
 
Du surf en salle
Plus besoin d’habiter près de l’océan ou de poser ses congés pour aller à Biarritz, le surf peut désormais se pratiquer en pleine ville. Wave in Paris dans la capitale, Wave surf Café à Bordeaux ou Perpignan, Nicki Surf au Décathlon Village de Marseille… Toutes ces salles proposent des vagues artificielles (grâce à différentes techniques comme de la projection d’eau à forte puissance) souvent modulables pour atteindre entre 40 cm et 1,30 mètre selon le niveau. Pratiqué régulièrement, ce sport ludique et très physique permet de brûler un maximum de calories, de renforcer son équilibre et potentiellement de s’offrir quelques fous rires en équipe. Prêts à remplacer vos afterworks ?
 
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Rigologie : une pratique méconnue pour vous faire rire en entreprise

Le dimanche 7 mai, c’est la Journée Mondiale du Rire. Initié en 1998 par le Dr Madan Kataria (père du yoga du rire), ce mouvement aspire à “la paix mondiale par le rire”. Avant de régler des conflits politiques, le rire possède d’innombrables bienfaits sur la santé physique et mentale, notamment grâce à la libération des endorphines : réduction du stress et effet bonne humeur (Université du Maryland), renforcement du système immunitaire (Université Loma Linda en Californie), apaisement des douleurs (Université de Zurich), amélioration du lien social (Université d’Oxford)…

On comprend mieux pourquoi les professionnels de santé recommandent de rire 10 à 15 minutes par jour pour être en bonne santé !
Seulement, dans la réalité, si un enfant rit en moyenne jusqu’à 300 fois par jour, un adulte lui, rit quotidiennement en général… seulement 4 fois. Un phénomène amplifié en entreprise, où rire un peu trop souvent serait considéré comme un manque de sérieux. Une aberration selon Aymeric Astier, qui pratique un métier méconnu du grand public et ce depuis 8 ans, rigologue.

 

Qu’est-ce que la rigologie ?

“C’est le fait d’amener le rire par le jeu” nous explique Aymeric. Une pratique à ne pas confondre avec le yoga du rire qui est “une méthode d’exercice physique, musculaire” et provoque un rire volontaire.
La rigologie provoque le rire de façon spontanée et naturelle – c’est pour cette raison qu’elle est plus accessible, et de plus en plus demandée en entreprise ! “Lors d’un atelier de rigologie, on enchaîne des exercices ludiques, on respire pour nous amener progressivement à lâcher prise. On termine souvent par un éclat de rire général car tout le monde est très détendu”. Et les effets sont immédiats pour ses élèves : relâchement, euphorie, sentiment de connexion avec autrui…
“Le rire sollicite beaucoup de muscles (ndlr : 130 muscles, dont les abdominaux et les muscles respiratoires) et libère ainsi, comme toute activité physique, les hormones du bonheur. Le rire améliore aussi le sommeil, booste le système immunitaire, soutient le système digestif… Tout ce qui est nécessaire pour combattre le stress !

Sur le plan psychologique, une session seulement aide à prendre du recul. En entreprise, c’est assez spectaculaire parce que l’on se détache petit à petit du culte de la performance pour avancer plus sereinement. Cet espace de liberté est aussi un formidable vecteur de cohésion d’équipe !”

Plutôt confidentielle en France, la rigologie est pourtant une profession agréée que l’on étudie sur un cursus de 3 ans à l’École Internationale du Rire. “Pas besoin d’être drôle pour faire ce métier, précise Aymeric, mais vous le deviendrez forcément ! On est plus spontané, plus positif, et forcément l’humour suit”.

 

Merci à Aymeric pour son éclairage
http://www.solution-rire.fr/

 

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« Workation » ou comment mixer vacances et télétravail

Combinaison des mots anglais “work” et “ation” (pour “travail” et “vacances”), le concept du workation permet aux personnes actives de voyager tout en travaillant.

Selon une étude du cabinet Godiveau, ce mode de vie en pleine expansion concernait déjà 10,2 millions de personnes en 2021 (contre 6,3 millions en 2020). Peu étonnant quand on se penche sur les bénéfices : profiter d’une météo clémente, booster sa productivité, découvrir le monde et (vraiment) déconnecter pendant ses congés – à condition cependant, de bien gérer son temps en télétravail !

 

Ils ont testé

 

Grâce à la généralisation du télétravail, plus besoin d’être indépendant pour goûter aux joies de ce nouveau genre de nomadisme digital.

Steven, 25 ans, et Emmanuelle, 26 ans, tous les deux salariés dans la tech, ont été les premiers de leur entreprise à tenter l’expérience, en Thaïlande. Un prestataire a géré l’ensemble de leurs démarches, laissant à leur seule charge les billets d’avion et le loyer sur place.

 

Les jeunes salariés ont décidé de décaler leurs horaires de travail pour préserver le lien avec leurs contacts français : 13h- 21h15 en hiver et 12h-20h15 en été (soit 7h-15h15 heure française). “La plupart de nos clients sont déjà prévenus, et le prennent très bien. Tant que nous restons joignables pour eux, il n’y a pas de problème” nous partagent-ils. Cette organisation leur permet de travailler dans de bonnes conditions, tout en profitant de la vie locale. L’intérêt principal de l’expérience étant en effet de pouvoir découvrir une nouvelle culture en conservant son emploi et les avantages qui en découlent (salaire, mutuelle, congés…).

 

Cerise sur le gâteau ? C’est un moyen de voyager plus “responsable”, en profitant pleinement d’une destination sans exploser son bilan carbone !

 

 

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Le Grand Entretien : Julie Walbaum, CEO de « Maisons du Monde »

Vous dirigez Maisons du monde depuis juillet 2018. Que signifie le « management inclusif » pratiqué par votre entreprise ?   Un management inclusif repose avant tout sur une entreprise à l’écoute, qui sait que sa valeur vient des femmes et des hommes qui la composent, en particulier dans le secteur de la vente au détail qui est le […]

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Raison d’être, sens et… réalisation de soi

Le professeur Jean-Jacques Breton est un psychiatre canadien à l’origine de travaux sur les « facteurs de protection ». Il explique que, tout comme il existe des facteurs de risque en matière de suicide, il existe des facteurs de protection, utiles à mettre en œuvre. Il précise que « si l’on favorise ces “facteurs de protection”, les gens […]

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L’oeil de… Thierry Marx

Que vous inspire le mot "collectif" ? Le collectif, c’est un peu un mot fourre-tout. On nous le tartine, on nous le beurre... On nous dit “il faut être solidaires”, mais on n’a pas appris à être “un”. On n’a pas appris, d’abord, à être solitaires. Pour créer un bon collectif, il faut être solitaire […]

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Salaires : cette part variable qui change la donne

Cela fait douze ans que Primeum, cabinet de conseil en rémunération variable, connaît une croissance constante. Son rôle ? Accompagner les grands groupes, et depuis peu les PME et les start-up, dans la mise en place de la rémunération variable. “Aujourd’hui, la quasi-totalité des grands groupes et ETI appliquent ce mode de rémunération, les TPE […]

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CPAM : La coopération en pratique

L'enjeu de notre démarche, à la CPAM des Yvelines, est de transformer le management afin de permettre la prise d’initiatives de nos collaborateurs dans le but d’aboutir à des résultats dont nous serons fiers. L’objectif de nos actions est de faire émerger progressivement une nouvelle culture d’entreprise dans laquelle chaque salarié peut exprimer pleinement son […]

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Managers, prenez soin de vous !

Apprendre à faire la part des choses…

Si l’on était en mesure, le soir, de penser davantage à ce qui s’est bien passé dans la journée qu’aux soucis, le stress serait moindre. Il est donc intéressant de rééduquer notre cerveau à une telle pratique grâce à un exercice simple. Lorsque la journée est terminée, il suffit de noter sur une feuille séparée en deux colonnes d’un côté ce qui s’est mal passé, de l’autre ce qui s’est bien passé. Il s’agit ensuite de repérer les trois choses les plus positives dans la colonne des éléments qui se sont bien passés et de s’efforcer d’y penser en se couchant. Ainsi, le niveau de stress diminue, améliorant de ce fait la qualité du sommeil.

Si certains sont plus sensibles aux outils informatiques qu’à l’écriture dans un petit carnet, il existe une application qui aide à faire cet exercice : “Bien chaque matin”. Elle reprend exactement les principes suscités et permet également de constater ses progrès.

Augmenter son sentiment d’efficacité personnelle…

On sait que plus le sentiment d’efficacité personnelle (1) est élevé, moins on est exposé au stress. Augmenter de manière concrète le sentiment d’efficacité personnelle est possible grâce à un moyen simple : le carnet des petits succès. Cela consiste, avant de se coucher, à prendre un petit carnet – ce peut être le même que celui utilisé pour l’exercice précédent – et de noter un éventuel petit succès remporté dans la journée. Cela ne se produira pas forcément quotidiennement, mais il suffit de noter les petits succès remportés au fur et à mesure qu’ils apparaissent. Lorsque l’on note un nouveau succès, on ne peut s’empêcher de relire les deux ou trois précédents et, petit à petit, le sentiment d’efficacité personnelle augmente, le stress diminue, la confiance en soi et vis-à-vis des autres s’améliore, la persévérance est plus à portée de main et l’optimisme se développe.

Ici, le mode d’action implique une modification de l’expression d’un gène : OXTR. Selon une étude (2), il a été montré que certaines ressources psychologiques peuvent influer sur l’expression d’un gène. Ainsi, le sentiment d’efficacité personnelle augmenterait l’expression du gène codant pour le récepteur à ocytocine (OXTR) et en favoriserait ainsi l’expression. Or, l’ocytocine a une action apaisante, facilitatrice de la persévérance, de la confiance en soi, de l’optimisme et de la créativité.

Trois minutes pour vivre mieux…

Prendre soin de soi, en diminuant les sécrétions d’hormones agressives (3) pour notre organisme lorsqu’elles sont libérées en grande quantité et de manière durable, en augmentant la libération d’une hormone protectrice (4) et en modifiant les ondes du cerveau, demande trois minutes par jour, trois minutes pour… vivre mieux !

1. Le sentiment d’efficacité personnelle est la conscience que l’on a que, dans un domaine bien précis, on sait faire…
2. Étude publiée dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), menée par Shelley E. Taylor et Shimon Saphire- Bernstein de l’université de Californie à Los Angeles.
3. Adrénaline et noradrénaline.
4. Ocytocine.

 

Voir aussi : Osons l’optimisme !

Le management du collectif à l’épreuve des crises

Théodore Roosevelt (1) disait : “Le bon dirigeant est celui qui se laisse entourer par les meilleurs, et se retient d’interférer dans leur travail.”

Rares, hélas, sont les dirigeants capables de lâcher prise. Ils sont encore trop nombreux à multiplier les systèmes de contrôle de l’activité de leurs collaborateurs, interdisant ainsi toute possibilité d’initiative. “Vous ne pouvez pas forcer le caractère et le courage des gens en décourageant l’initiative et l’indépendance ; vous ne pouvez pas donner de la force aux faibles en affaiblissant les forts ; vous ne pouvez pas favoriser la solidarité en encourageant la lutte des classes ; vous ne pouvez pas aider les gens en faisant pour eux ce qu’ils doivent faire par eux-mêmes.” Abraham Lincoln (2), en prononçant ces phrases devant le Congrès américain en 1861, posait les bases de ce que l’on appelle l’empowerment dans le monde de l’entreprise.

Alimenter la défiance et les peurs par des contrôles tatillons ne peut conduire qu’au pire. On ne bâtit rien de durable sur du négatif, que du négatif. La défiance est un poison mortifère tan- dis que la confiance reste un pari. “Ne dites jamais aux gens comment faire quelque chose, dites-leur quoi faire, et ils vous étonneront par leur ingéniosité (3).”

Les managers doivent s’approprier cette attitude. Ils ne peuvent pas se contenter d’exiger des résultats, de la performance, de l’implication, etc. Chaque individu possède en lui-même les clés de sa motivation. Ce n’est qu’à travers un dialogue confiant et sincère qu’un manager peut les découvrir, les encourager et les mobiliser au service du projet. Le contrôle implique trop souvent la soumission, tandis que l’autonomie encourage l’implication. S’il existe des êtres humains préférant une certaine soumission par peur de s’impliquer, préférant reporter sur d’autres les raisons de leur désengagement, il en est de bien plus nombreux qui, à l’inverse, osent l’autonomie responsable pour se réaliser.

Savante alchimie, l’empowerment entremêle les notions de bienveillance, de compétence, de confiance, d’exigence, de justice, de reconnaissance, de responsabilité, de sécurité et de sens. Les pratiques de qualité de vie au travail (QVT), de responsabilité sociétale et environnementale (RSE), de partage (Comp & Ben), de développement personnel (assessment, coaching, formations, etc.), de dialogue et de relations sociales doivent s’inscrire dans un cadre cohérent conjuguant les multiples contraintes économiques, politiques, techniques et sociales qui animent l’écosystème complexe de toute organisation, qu’elle soit publique ou privée. Osons l’intelligence collective !

1. Théodore Roosevelt (1858-1919), 26e président des États-Unis de 1901 à 1909, naturaliste, explorateur, historien et écrivain.
2. Abraham Lincoln (1809-1865), 16e président des États-Unis de 1850 à 1865, partisan de l’émancipation des esclaves.
3. Général américain George S. Patton (1885-1945), cité dans Patton, Yannis Kadari, éditions Perrin 2011.

 

Voir aussi : Collectif : une question de bon sens !

Collectif : une question de bon sens !

J’avoue me sentir toujours un perplexe face à ces nouveaux concepts qui émergent au gré des dernières tendances managériales : “créer du collectif en entreprise”, “favoriser le bien-être au travail”, “manager les talents”…

Pour nos grands-parents, les concepts de ce type étaient totale- ment absents. Ils pouvaient avoir un patron plus ou moins conciliant, et des collègues plus ou moins sympathiques, mais l’idée que leurs espaces de travail puissent être des outils pour favoriser la cohésion de groupe leur aurait semblé parfaitement incongrue. Nos aïeuls étaient naturellement plus unis et plus soudés au travail, et construisaient des collectifs puissants et solides car ils avaient des combats à mener, des territoires à conquérir, de grands projets à porter : de meilleures conditions de travail, les congés payés, plus d’avantages sociaux…

Pourquoi l’esprit d’équipe se délite ?

Aujourd’hui, les collectifs perdent leur sens, laissant place à toujours plus d’individualisme, de compétition et de concurrence. Si bien que les salariés finissent épuisés et désemparés… Pourquoi ? Très probablement parce qu’à force de process toujours plus rigoureux, de niveaux hiérarchiques sans fin, de managers inutiles et de fiches de poste étriquées, ils se retrouvent coincés dans des structures technocratiques qui les écrasent. Mais aussi parce qu’avec les évolutions technologiques, la généralisation du télétravail et la dématérialisation de nos échanges, les occasions de créer du lien “dans la vraie vie” se font de plus en plus rares.

Des postures managériales infantilisantes

S’ajoute à cela une tendance naturelle et encore très répandue dans les entreprises du “command & control”, héritée des méthodes d’organisation scientifiques du travail, préconisant des postures managériales infantilisantes, qui découragent plutôt qu’elles encouragent.

Si bien que dans ce contexte, le collectif n’a pas lieu d’être, puisque l’individu lui-même est bien souvent nié. Dès lors, parler de collectif me semble, comment dire, secondaire, pour ne pas dire illusoire. Quoi qu’il en soit, le fait que les entreprises se préoccupent aujourd’hui autant du sujet du collectif est un signal. Cela dit quelque chose. Et pour ma part, disons que j’ai du mal à croire que ce soit dans un but purement philanthropique.

Le collectif aujourd’hui, plus que jamais

Ce qui m’amène à me poser une question qui me semble fondamentale : Pourquoi ? Pourquoi cette obsession du collectif ? Pourquoi est-ce un enjeu si important pour les entreprises ? Et pourquoi maintenant ?

Tout d’abord parce qu’on est plus intelligent à dix cerveaux qu’à un cerveau ! Parce que l’humain, pour être efficace, pour évoluer et grandir, a besoin des autres. Parce que seul on va plus vite, mais qu’ensemble on va plus loin. Le collectif est directement lié à la performance. Peu de grandes avancées humaines sont le fruit du travail isolé d’un seul homme dans son coin. Plus on arrive à collaborer, à coopérer, à s’unir, à s’entraider, plus on est intelligents, ensemble. Cela s’appelle de l’intelligence collective. À partir du moment où l’on accepte de faire challenger son travail par d’autres, il y a de fortes chances que le résultat final soit meilleur. Autrement dit, quand le collectif fonctionne, les projets avancent, ils sont plus solides, efficaces, sexy, désirables. Et cela, les entreprises l’ont parfaitement bien intégré. En revanche, pour “faire” du collectif, pour partager, s’entraider et s’inspirer des autres, il faut faire confiance, cultiver la sincérité, l’authenticité, le lâcher-prise.

Malheureusement, ces postures ne sont pas encore dans l’ADN du monde des entreprises aujourd’hui. Pourquoi ? Parce que nos cerveaux sont surentraînés dès l’école maternelle aux classements, aux notes, à gagner aux billes, et à finir premier de la classe.

Conditionnements

C’est un sujet très profond, ancré, reptilien, ancien. Il s’agit de notre relation au pouvoir, de nos peurs, de nos ego surdimensionnés. Quel peut donc être le ciment des groupes de demain ? Ce qui donne envie aux gens de travailler ensemble, c’est tout simplement l’envie de réaliser quelque chose de grand. De pouvoir s’y investir librement, en y apportant leur patte, leur façon de faire, leur permettant de s’y reconnaître, d’en être fiers. Puis d’avoir la possibilité de tirer profit des fruits de ce travail. J’aime comparer le monde du travail au monde de l’art. Imaginez un seul instant si on avait collé des process à Rodin ou à Manet pour réaliser leurs chefs-d’œuvre…

Si on avait établi des protocoles pour réglementer la vie en atelier, avec des managers, des reportings, des plannings et des meetings… La créativité, la passion, l’engagement, l’envie profonde et sincère de travailler ensemble, de se donner à fond, cela suppose de l’audace, de la liberté, de la prise de risques, des écarts, des opinions, des passions, des… émotions ! Et l’entreprise n’est pas vraiment un lieu qui accueille les émotions, tant s’en faut.

Monter les meilleures équipes de travail se fait avec un ingrédient imparable : le bon sens ! Ce qui donnera envie aux gens, demain, d’aller au travail, ce sont leurs collègues, pas leurs bureaux ! Le cadre est accessoire. J’ai vu des startuppers travailler dans des sous-sols miteux et être très heureux… Et a contrario, j’ai vu beaucoup de salariés de grands groupes installés dans des bureaux dernier cri, jouissant de cantines cinq étoiles et d’avantages indécents, mais souffrant d’une dépression sévère…

Quoi qu’il en soit, et quitte à paraître mièvre, je dirais tout simplement que ce qui permet de construire du collectif, c’est l’amour et la liberté. Pour accompagner des équipes et leur donner envie de travailler ensemble, il faut les aimer et les protéger, et surtout, surtout, leur ficher la paix et les laisser faire. Avec de l’écoute, du respect, de l’humilité, de la sincérité et de l’authenticité.

Jouer collectif, c’est une question de pragmatisme

Pour ma part, toutes les belles choses qu’il m’a été donné de réaliser en entreprise, je les ai menées en équipe. C’est grâce à mes pairs, à mes collègues, à mes managers que j’ai appris, grandi, changé de point de vue, évolué, que je me suis trompée et que j’ai réussi à me relever… Alors pour les plus sceptiques, et même si vous n’y croyez pas, je dirais ceci : essayez de jouer le jeu du collectif, vous y gagnerez non seulement en efficacité, mais surtout, en plaisir et en confort. C’est mathématique. “Lorsque deux forces sont jointes, leur efficacité est double.” Isaac Newton.

 

Voir aussi : Le management du collectif à l’épreuve des crises