Chaque année, le mois d’octobre marque le début d’Octobre Rose, la campagne de sensibilisation internationale du dépistage du cancer du sein, une maladie qui touche 1 femme sur 12 au cours de sa vie selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Via diverses activités et évènements, des collectes de fonds pour soutenir la recherche, de nombreuses organisations affichent leur soutien, aident à libérer la parole et incitent les femmes à se faire dépister. Car, toujours selon l’OMS, « détecté tôt, le cancer du sein est guéri dans 90 % des cas ».
Plus globalement, l’Institut national du cancer (INCA) estime à 433.136 le nombre de nouveaux cas de cancer pour l’année 2023 en France (187.526 chez la femme, 245.610 chez l’homme). Santé Publique France annonce qu’une femme sur 6 et 1 homme sur 5 développeront un cancer au cours de leur vie. Si l’âge moyen de prise en charge pour un cancer varie entre 64 ans pour les femmes et 67 ans pour les hommes, il est loin d’être impossible de croiser un collègue touché par la maladie, quel que soit son âge, et peut-être même d’être déstabilisé face au comportement à adopter.
Bien accompagner un collègue malade : la marche à suivre
Collègue, famille ou ami, soutenir une personne malade, c’est avant tout se montrer présent, pour le moral de la personne, mais aussi pour son processus de guérison. 92 % des patients estiment que recevoir du soutien influence positivement leur état de santé (selon le groupe Publicis pour Work With Cancer). Un ressenti confirmé par Marc, cadre de 61 ans en rémission, à l’annonce de son cancer il y a quelques mois : « J’ai reçu des appels des quatre coins du monde de collègues plus ou moins proches, des messages gentils et sincères via SMS, WhatsApp, mails… Je ne m’y attendais pas et ça m’a beaucoup touché. »
Avant, pendant et après le traitement, c’est aussi le rôle de l’entreprise de garder le contact : « même en cas d’arrêt de travail, l’entreprise doit garder un lien avec le salarié pour ne pas briser le lien professionnel, éviter la solitude et le désengagement. On prend des nouvelles, on communique sur les dernières avancées de l’entreprise, etc. », précise Anaëlle Thierry, chargée de recrutement et d’intégration dans une grande entreprise.
Un rythme particulier
Contraignants et fatigants, les traitements lourds entraînent un aménagement des horaires, voire, bien souvent, des arrêts de travail (qui peuvent être successifs, continus ou discontinus). Une pause essentielle pour que le malade puisse se concentrer sur sa guérison et son rétablissement. Pendant l’absence d’un collègue malade, l’entreprise peut procéder à une réaffectation des tâches. Ça a été le cas pour Marc, en arrêt pendant deux mois et demi : « mes missions principales et les urgences du quotidien ont été redistribuées dans l’équipe, mais les sujets de fond n’ont pas été traités ».
Trentenaires à la tête d’une agence de communication, Marie et Julia ont toutes les deux vécu des épreuves ces dernières années et ont appris à composer avec les aléas de la vie : « quand j’ai fait mon AVC, on n’a rien mis en place car c’était très soudain et inattendu, raconte Marie. Mon associée a pris le relais temporairement en essayant de gérer les urgences au jour le jour. »
Et quand Julia, son associée, est diagnostiquée un an plus tard d’un cancer du sein triple négatif, les deux entrepreneurs se sont organisés : « une fois le choc de l’annonce passé, on s’est attelées à un plan d’attaque réaliste, en prenant en compte le fait qu’elle allait sûrement se mettre en mi-temps thérapeutique, même si c’est difficile quand on est à son compte. On s’est posé les bonnes questions : quelles missions Julia avait-elle envie de garder ? Qu’est-ce qu’on pouvait déléguer ? On a fait le choix de s’entourer de personnes de confiance, quitte à baisser nos revenus. » Le plus difficile pour un collègue accompagnant selon Marie ? « Trouver l’équilibre entre trop parler de la maladie et traiter l’autre différemment, ou justement être trop indifférent. J’ai essayé d’être là en suivant de près chaque étape tout en restant professionnelle, en continuant de lui faire confiance et d’avoir des projets à long terme ensemble. »
Faciliter le quotidien d’une personne malade au travail, cela requiert du bon sens
Pourtant, 50 % des personnes atteintes d’un cancer auraient toujours peur d’en parler à leur employeur (selon une étude de l’association Cancer@Work). Pas d’inquiétude selon Anaëlle, « l’entreprise peut en effet alléger la charge de travail du collaborateur, lui proposer plus de télétravail et de flexibilité, voire le changer de poste en fonction de ses envies, mais en aucun cas le rétrograder à cause de sa maladie ». Pour éradiquer la stigmatisation du cancer sur le lieu de travail, la fondation Publicis a lancé Working With Cancer début 2023, la première coalition mondiale d’entreprises avec le soutien de l’Institut Gustave Roussy et de l’association cancer@work en France, le Memorial Sloan Kettering Cancer Center aux Etats-Unis et le MacMillan Cancer Support au Royaume-Uni.
Une idée claire : que chaque entreprise signataire (comme pour l’instant Nestlé, Meta, Unilever, Accor, Disney…) s’engage pour une culture d’entreprise « plus ouverte, solidaire et favorable à l’intégration des salariés atteints de cancer ». Publicis par exemple, garantit l’emploi et le salaire de chaque employé touché par la maladie pendant au moins un an et offre un programme d’accompagnement personnel et professionnel aux malades et aux salariés aidants. Petites, moyennes et grandes entreprises peuvent s’engager, et ainsi aider les malades à vivre un peu plus sereinement cette période difficile, du moins côté travail.
Des petites attentions peuvent faire toute la différence
« Les premiers jours de mon arrêt de travail, j’ai reçu de la part de toute mon équipe un panier rempli de vin et de gourmandises. Se dire que les gens pensent à nous, ça met un peu de baume au cœur », partage Marc. À son retour, ses collaborateurs ont organisé un dîner de retrouvailles. Marie, elle, a opté pour un cadeau symbolique en début de chimio : « on s’est cotisé avec tous nos clients pour offrir à mon associée un très joli collier en forme de trèfle, comme un talisman. À la fin de son traitement, je lui ai offert une nappe qu’elle avait repérée, un cadeau sympa quand on retrouve l’appétit une fois rétabli. » Si les cadeaux personnels et les moments informels rendent le retour au travail plus agréable, l’entreprise peut aussi organiser la réintégration du salarié de façon plus structurée, conclut Anaëlle : « planifier l’aide d’un coach ou d’un autre professionnel, prévoir des rendez-vous hebdomadaires pour suivre la reprise du travail, favoriser la communication interne (dans le respect de la vie privée du salarié)… Presque comme si c’était l’intégration d’un nouveau collaborateur. »
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