La transition numérique de Sanofi

Quelles sont vos missions au sein du groupe Sanofi ?

Avec mes équipes, nous travaillons pour améliorer l’expérience sur les outils digitaux. Et ce durant tout le parcours du collaborateur dans l’entreprise, de son intégration en passant par son développement et ses évolutions de carrière. La vocation de Sanofi est de poursuivre les miracles de la science pour améliorer la vie des gens, et notre mission est d’améliorer la vie de tous nos collaborateurs.

L’IA est-elle intégrée au cœur des métiers de Sanofi ?

Oui. Nous avons beaucoup de partenariats avec des start-up françaises mais aussi internationales pour, par exemple, accélérer le diagnostic des personnes atteintes de maladies rares. Aujourd’hui, près 3 millions de Français en souffrent, dont la moitié sont des enfants. Le délai moyen de diagnostic en France est de deux à trois ans, et 25 % des malades restent en errance diagnostique entre cinq et seize ans. Avec ce partenariat, nous avons donc une belle opportunité d’accélérer le diagnostic des malades. Autre exemple, nous développons également des méthodes de machine learning et d’intelligence artificielle de pointe afin d’exploiter au mieux les données durant toutes les étapes que comprend le développement de nouveaux médicaments ou de vaccins, puisque la recherche est l’un de nos métiers d’expertise. En 2022, nous avons lancé notre « accélérateur digital », dont la vocation est d’aider l’entreprise à concrétiser son ambition de figurer parmi les leaders de la santé digitale. Il vise à développer des produits et solutions au service de la mission du groupe grâce au numérique, aux données et à l’IA. Implanté à Paris, il s’appuie déjà sur une équipe de plus de 75 spécialistes du monde entier et continuera de recruter des talents de premier ordre, spécialisés dans le product management, le développement full stack et la data science. On accélère l’adoption de cette technologie dans un grand nombre de solutions afin d’apporter de la valeur à nos collaborateurs, à nos chercheurs, aux patients et aux professionnels de santé.

Quel est le rôle de la DRH dans cette implémentation de l’IA ?

L’expérience de nos collaborateurs est une priorité, et les RH s’appuient beaucoup sur cette technologie, et plus largement sur les outils digitaux, pour améliorer leur bien-être dans l’entreprise, leur développement professionnel et personnel, qui sont deux grandes priorités, et surtout pour être dans l’air du temps, en accélérant leur adoption du digital. Si l’IA est importante, il ne faut pas négliger le volontariat des collaborateurs, la RGPD, la qualité, car nous évoluons dans un secteur réglementé, et ces éléments sont essentiels à prendre en compte. Notre stratégie n’est pas de surfer sur la vague mais de le faire intelligemment, de savoir comment s’en servir pour apporter de la valeur à nos collaborateurs.

Comment l’IA peut-elle améliorer l’expérience collaborateur ?

Nous l’utilisons à travers deux domaines : le développement et la formation, qui sont pour nous le même sujet, et l’engagement, le bien-être des salariés. Sur la partie développement personnel, nous avons mis en place un outil RH depuis un an où les collaborateurs ont leur profil détaillé et où ils peuvent, sur la base du volontariat, trouver tous les postes proposés ainsi que les différentes organisations internes, leur permettant de se connecter avec d’autres collaborateurs. Cet outil interne recense l’historique des postes qu’ils ont occupés tout au long de leur carrière, les compétences et les aptitudes qu’ils ont indiquées, comme sur un profil LinkedIn, et l’IA permet de faire correspondre leur profil avec des opportunités de développement. Cela peut être du networking, de la connexion au sein de l’entreprise avec des personnes qui ont les mêmes aspirations de carrière, les mêmes compétences, ou des postes à pourvoir. C’est un peu comme un réseau social, mais interne.

Une partie dite projets est également visible : il s’agit de projets internes postés par des managers ou des collaborateurs et pour lesquels sont recherchés des talents au sein du groupe. Cela amène une grande amélioration de la diversification de nos talents dans leur développement personnel. Par exemple, j’ai pu recruter des personnes en Afrique du Sud qui évoluaient dans le domaine de la finance, dans des métiers qui n’avaient rien à voir avec le mien et que je n’aurais jamais pu rencontrer par le réseau classique. Cela permet ainsi d’agrandir et d’apporter beaucoup plus de diversité, d’interconnexion et d’inclusion au sein du groupe, et surtout d’enlever les biais cognitifs que peut avoir une personne lorsqu’elle recrute en interne, parce que les profils correspondent aux compétences et non pas à la personne.

Et qu’apporte l’IA en matière de formation ?

Sur le même concept, l’IA va venir regarder de façon anonyme, toujours sur la base du volontariat, le profil et les compétences d’un collaborateur et lui proposer des formations en lien avec son parcours de développement et qui correspondent aux objectifs du groupe. La valeur ajoutée de l’IA permet d’apporter de la personnalisation, c’est-à-dire que nous avons des solutions adaptées aux besoins, qui sont faites de façon automatique pour que les collaborateurs puissent se focaliser sur leur développement personnel et se libérer du temps pour apporter plus de valeur, en se focalisant sur leur accompagnement personnalisé. C’est un sujet passionnant qui favorise aussi la cross-fertilisation. Cela permet vraiment de casser les silos que l’on peut avoir dans les grandes entreprises et de faire ressortir le potentiel des collaborateurs.

Vous parliez également d’engagement. Comment les outils d’IA peuvent-ils aider sur ce sujet ?

Depuis plusieurs années, l’engagement est une des priorités chez Sanofi, que ce soit le bien-être, la diversité, l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, le développement personnel. Nous faisons régulièrement des enquêtes anonymes auprès de nos collaborateurs sur ces thèmes. Par exemple, fin 2021, nous avons mis en place un outil interne pour aider les managers à soutenir leurs talents dans leur parcours « bien-être ». L’IA va regrouper les réponses par thématiques, les scores, et transmettre en très peu de temps au manager les points forts de son équipe comme les points d’amélioration, et ainsi proposer des plans d’action concrets. Les collaborateurs ont connaissance des résultats ce qui permet à toute l’équipe de mettre en place ces plans d’action et de les suivre. C’est très important pour un collaborateur de savoir qu’il y a un plan d’action derrière.

Les collaborateurs participent-ils à l’élaboration de ces outils ?

Toutes les solutions qui touchent aux salariés sont faites en collaboration et font appel au design thinking. Nous prenons des échantillons représentatifs de notre population, auxquels nous présentons ce que nous pensons faire, les besoins autour de certaines thématiques. Il s’agit d’un vrai échange. Comme mentionné précédemment, tous nos outils en développement font l’objet d’enquêtes de satisfaction et de comptes rendus : nous co-construisons les solutions que nous apportons. Et ce cercle vertueux ne s’arrête pas là, car nos outils sont développés en mode agile, avec des petits cycles de développement très courts basés sur le retour des collaborateurs. Cette pratique se fait pour tous les outils qui apportent une amélioration en continu. Dans tous les cas, je dirai que, si le potentiel de l’IA semble illimité, il ne remplace pas la compétence humaine. Le plus important est d’associer les deux pour pouvoir progresser.

En Europe, les femmes n’occupent que 18 % des emplois du numérique

La Commission européenne a publié en décembre dernier un tableau de bord sur la place des femmes dans le monde du numérique, et les écarts sont encore très prononcés entre les sexes, puisque « seulement 18 % des spécialistes des technologies de l’information et de la communication sont des femmes », selon les mots de Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive de la Commission.

Dans le classement des pays, la Finlande, le Royaume-Uni, la Suède, le Danemark et les Pays-Bas occupent les cinq premières places, tandis qu’en bas du tableau se trouvent la Bulgarie, la Roumanie, la Grèce et l’Italie.

La France se classe 9e, l’Espagne 10e, et l’Allemagne 12e. « Pour être à l’avant-garde de la transition numérique, notre industrie doit exploiter pleinement le potentiel de compétences de l’Europe et encourager les talents des femmes », déclare Thierry Breton, le commissaire au marché intérieur, qui promet de consacrer « au moins 20 % du fonds pour la reprise et la résilience au numérique », dans le but d’« ouvrir la voie au renforcement des compétences informatiques des femmes dans toute l’UE ».