Quelle empreinte émotionnelle vais-je laisser dans mon entreprise ?

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Il faut savoir que les émotions du dirigeant peuvent rapidement se transmettre à ses collaborateurs via un phénomène de « contagion émotionnelle », et que cela peut avoir une incidence forte sur le cours des choses.

Par Christophe Haag , professeur HDR à emlyon

Quelle empreinte émotionnelle vais-je laisser dans mon entreprise ? C’est une question qui taraude bon nombre de dirigeants qui ne parviennent pas toujours à mesurer leur impact émotionnel sur les autres. Chip Conley, entrepreneur et auteur à succès, a quantifié le degré de « contagiosité » du boss au niveau de son équipe : selon lui, 50 % à 70 % du climat émotionnel d’une équipe dépendent directement des émotions que dégage le ou la chef.

Autrement dit, si le chef ressent une émotion particulière, que ce soit de la sérénité ou de la colère, l’équipe a de fortes chances de la ressentir à son tour. Pourquoi ? Tout simplement car le niveau d’attention que l’on prête à son supérieur hiérarchique, souvent par comparaison sociale ou simplement par intérêt, rend les émotions de ce dernier plus facilement détectables et donc contagieuses.

Le problème, c’est quand un dirigeant émet constamment des émotions toxiques, c’est-à-dire des émotions inappropriées, qui ne jouent pas leur rôle d’aide à la socialisation, ne bénéficient aucunement à autrui, altèrent la qualité de la relation avec l’autre, et placent l’autre en situation d’inconfort et/ou d’infériorité, etc. Car ces émotions sont, pour le « contaminé », très compliquées à décrotter, comme le plastique, qui met beaucoup de temps à se décomposer. L’empreinte émotionnelle de ce type de dirigeant est déplorable, marquée par les tonnes de déchets émotionnels qu’il balance chaque année dans son entreprise et qui polluent tout l’écosystème !

Si l’on part du principe que l’émotion est un virus qui circule de cerveau à cerveau, de corps à corps, et que le dirigeant est plus contagieux que la moyenne, les questions que je vous pose, à vous dirigeants, sont les suivantes : Quel type d’« agent pathogène » avez-vous envie d’être dans votre entreprise ? Un pourvoyeur d’émotions toxiques ou d’émotions bénéfiques ? Une « enflure toxique » qui démontre un haut niveau de toxicité émotionnelle ? Ou un maître Jedi, capable de diffuser autour de lui des émotions bénéfiques permettant d’entraîner dans son sillage, et de la meilleure manière qui soit, une communauté d’individus ?

Ces questions sont cruciales, qui plus est en temps de crise tant économico-sanitaire que psychologique, que l’humanité tout entière, et les entreprises en particulier, traverse aujourd’hui. Une crise marquée par ce que j’appelle un « hum émotionnel négatif », comprenez un surplus de négativité qui plombe le moral des troupes, les énergies créatrices, la motivation, le liant interpersonnel, les dynamiques constructives. Ainsi le dirigeant devrait s’employer, jour après jour, à diffuser au sein de son entreprise des émotions bénéfiques pour renverser ce mauvais « hum ».

Partons du principe que les collaborateurs forment un tout émotionnel, une sorte de champ psychique invisible qui les relie émotionnellement les uns aux autres, un peu comme des gouttes dans l’océan, formant une vaste mer d’énergies vibratoires. Les émotions des autres nous imprègnent tous, d’une manière ou d’une autre, et influent sur nos états d’âme, nos comportements et souvent le cours de nos vies. C’est pourquoi ces « petits biens » peuvent se répandre comme une traînée de poudre… Le dirigeant peut d’ailleurs les produire intuitivement, quasi systématiquement et à haute dose, s’il s’emploie à développer son intelligence émotionnelle (IE). Il s’agit là d’une forme d’intelligence à part entière qui permet de traiter les émotions comme des informations utiles afin de composer au mieux avec son environnement.

Faire suivre des programmes de développement personnel – autour de la thématique de l’IE – aux dirigeants et aux futurs dirigeants d’une entreprise permettra d’augmenter la qualité de leur empreinte émotionnelle, et donc celle de l’entreprise tout entière, en affaiblissant significativement le niveau de toxicité émotionnelle. Car oui, il est possible de développer cette compétence, grâce à la plasticité cérébrale. Concrètement, il convient de leur faire passer, avant toute chose, un test d’IE fiable, comme le QEPro (Q pour quotient, E pour émotionnel), un outil spécifiquement dédié aux managers et aux dirigeants en France et que nous avons développé pendant deux ans à L’école de management emlyon business school, à Lyon. Nos résultats de recherche révèlent d’ailleurs que les dirigeants obtenant un score élevé à ce test sont moins toxiques, comparés à ceux avec score plus bas. Plus globalement, le QEPro donne une photographie à un instant T de leur profil émotionnel et, donc, des pistes précises pour un accompagnement sur mesure par des coachs certifiés QEPro. À guerre psychologique, armes psychologiques !