Nouvelles règles pour le congé paternité et l’accueil de l’enfant

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De nouvelles dispositions relatives au congé de paternité et d’accueil de l’enfant ont été publiées au Journal officiel le 15 décembre 2020. Une avancée majeure pour l’égalité hommes-femmes.

Par Émilie Meridjen et Camille Janson , associée et avocate en droit du travail chez Sekri Valentin Zerrouk

Les députés ayant porté la proposition de loi en septembre dernier rappelaient que « les mères [étaient] contraintes de prendre au minimum 8 semaines de congé maternité pour s’occuper de leur enfant, alors que les pères [pouvaient] légalement en être intégralement dispensés ».

Cette différence est lourde de conséquences pour les femmes, dont 84 % estimeraient que la maternité a un impact négatif sur leur carrière, selon le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle (CSEP).

En outre, alors qu’il existe toujours un écart de salaire entre les deux sexes, les députés porteurs du projet de loi soulignaient que le salaire des mères après la naissance d’un enfant baissait en moyenne de 2 % à 3 %, tandis que celui des pères augmentait dans les mêmes proportions.

La loi de financement de la Sécurité sociale opère des modifications dans le congé de paternité et d’adoption, qu’elle allonge et rend pour partie obligatoire.

Ces dispositions s’appliqueront aux enfants nés ou adoptés à compter du 1er juillet 2021 ainsi qu’aux enfants nés avant cette date, mais dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.

Le congé de naissance

Le congé de naissance, institué par le code du travail, est de 3 jours ouvrables (sa durée peut être augmentée par accord collectif). Il est rémunéré par l’employeur et ne peut entraîner de réduction de rémunération.

La LFSS rend ce congé obligatoire, ce qui signifie que l’employeur a l’« interdiction d’employer » le salarié, dès lors qu’il a été informé de la naissance de l’enfant, et que le salarié a obligation de prendre ce congé. Néanmoins, aucune sanction n’est prévue en cas de manquement de l’employeur à cette obligation.

La LFSS précise que le congé de naissance devra être pris au jour de la naissance de l’enfant ou à compter du premier jour ouvrable suivant. Auparavant, les règles étaient plus souples, puisque le congé devait simplement être pris dans un délai raisonnable suivant la naissance de l’enfant.

La liste des bénéficiaires a été étendue : sont désormais visés, outre le père de l’enfant, le conjoint ou le concubin de la mère, ou la personne liée à elle par un Pacs.

L’allongement du congé de paternité et d’accueil de l’enfant

Ce congé est actuellement de 11 jours. Il passera à 25 jours calendaires au 1er juillet.

Le congé de paternité en cas de naissances multiples est également augmenté et passera de 18 à 32 jours calendaires.

De même, le congé d’adoption est allongé et passe de 10 à 16 semaines pour les familles ayant au plus un enfant à charge et qui adoptent un enfant.

Rappelons que les congés de paternité et d’adoption s’appliquent à l’ensemble des salariés, quel que soit le type de contrat de travail : à durée déterminée, à durée indéterminée, à temps partiel, etc. et ce sans condition d’ancienneté.

Par ailleurs, à l’issue du congé, le salarié doit impérativement retrouver son emploi initial. Il bénéficie également d’une protection contre le licenciement de 10 semaines suivant la naissance de son enfant.

L’indemnisation du congé de paternité et d’accueil de l’enfant

Les règles d’indemnisation restent inchangées. Contrairement au congé de naissance, qui est rémunéré par l’employeur, le congé de paternité et d’accueil est indemnisé par la sécurité sociale.

Le salaire pris en compte pour calculer l’indemnité journalière est la moyenne des trois mois qui précèdent le congé, dans la limite du plafond mensuel de la Sécurité sociale de l’année en cours (soit 3 428,00 € pour 2020). Ainsi, le montant maximal au 1er janvier 2020 de l’indemnité journalière versée pendant le congé de paternité et d’accueil est de 89,03 € par jour.

Part obligatoire du congé de paternité et interdiction d’emploi

Autre changement important : le congé de paternité comportera une part obligatoire de 4 jours consécutifs qui doivent être adossés au congé de naissance.

Ainsi, une interdiction d’emploi correspondant aux 3 jours de congé de naissance et aux 4 jours obligatoires de congé de paternité sera donc mise en place pour l’employeur. Cela signifie que, même si l’intéressé ne formule pas demande de congés de naissance ou de paternité, l’employeur aura l’obligation de mettre le salarié en congé au moins pour cette durée (7 jours).

Rappelons que l’employeur régulièrement informé par le salarié de la date de prise du congé ne peut ni s’opposer à son départ ni en exiger le report. En revanche, si la date réelle d’accouchement est différente de la date estimée, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant ne peut être décalé qu’avec l’accord de l’employeur.

 

Un progrès timide…

La France reste en retard par rapport à ses voisins européens. Certains proposent des dispositifs bien plus favorables et égalitaires.

  • En Norvège, les parents peuvent choisir de percevoir 100 % de leur salaire sur 49 semaines de congé ou 80 % de leur rémunération pendant 59 semaines.
  • En Suède, les pères peuvent prendre 48 jours de congé, de même que les mères, payés à hauteur de 80 % du salaire.
  • En Finlande, les pères disposent de 54 jours de congés payés, 55 pour la mère, auxquels s’ajoutent 26 semaines de congé parental.
  • Le Danemark permet aux pères de prendre 2 semaines de congé, payées intégralement, les mères 18 ; les parents doivent ensuite se répartir 32 semaines payées 100 % de leur salaire.
  • En Espagne, les pères ont droit à 6 semaines payées intégralement.
  • En France, il reste possible de prolonger le congé de paternité et d’accueil de l’enfant par un congé parental d’éducation. Celui-ci n’est pas rémunéré par l’employeur. Ce congé ne peut être pris en même temps que le congé maternité de la mère.