La transformation par les collaborateurs
Jusqu’ici, la « formation » était dispensée par un « sachant » détenant un savoir et l’enseignant à un groupe. Aujourd’hui, les collaborateurs ont accès à des connaissances infinies et nous devons réinventer les savoirs pour ne pas perpétuer notre système qui produit des inégalités croissantes et des dégâts planétaires insoutenables.
Expérimenter des nouveaux formats
Alors à quoi sert la formation? A apprendre ensemble, surtout. Nous sommes des créatures sociales et nous apprenons en groupe, et dans l’action. La formation est un espace tout à fait propice à l’élaboration de nouveaux savoirs et savoir-faire collectifs, si les modalités et formats évoluent.
Voici quelques exemples d’innovations pédagogiques.
La recherche action ou la formation action participative. Plutôt que de partager son savoir, la formatrice ou le formateur est là pour assurer un processus rigoureux de recherche basée sur des actions concrètes et de la réflexion. L’essai et l’erreur, la mise en situation, l’expérimentation sont primés et l’important est d’apprendre de ses échecs et d’observer les conséquences inattendues de ses actions.
La classe inversée. Quand il s’agit d’apprendre des contenus intellectuels, ce format permet de ne pas passer du temps live à asséner des cours magistraux, mais de répondre aux questions des participant.e.s qui auront cherché à acquérir des notions en amont par leurs propres moyens ou en lisant ou regardant des matériaux proposés. L’accent est donc mis sur les échanges entre praticiens pour aller plus loin et appliquer les nouveaux acquis.
La formation en immersion ou la retraite. Parfois il est nécessaire de désapprendre nos habitudes avant d’en apprendre des nouvelles. Des formations en présentiel dans des lieux inhabituels – des éco-lieux au cœur de la nature, ou encore en pleine ville mais hors des quartiers habituels des entreprises – permettent des prises de conscience en profondeur, et invitent les participant.e.s à se rencontrer et à apprendre ensemble sur différents modes.
Renouveler les contenus
Dans un objectif de transformation des organisations et de nos sociétés, le contenu des formations est à renouveler, car nous avons collectivement besoin de nouvelles compétences, savoir-faire et savoir-être pour accompagner les mutations nécessaires.
Voici quelques champs de compétence essentiels dans cette perspective.
La prospective: nous avons besoin de capacités collectives à penser l’avenir. La prospective est une discipline rigoureuse qui permet d’explorer les futurs possibles et élaborer des stratégies pour avancer sur un chemin de transformation vers des futurs souhaitables. Dans un monde qui s’accélère, mais qui doit changer en profondeur, penser le temps long devient urgent.
Le discernement: devant l’accès à des connaissances infinies et hétérogènes sur internet, et face à des situations complexes et inédites dans un monde qui change, nous avons besoin de développer nos capacités de discernement. Nous devons apprendre comment choisir nos sources d’information, et comment élaborer des choix judicieux face à la complexité.
L’accompagnement au changement: quand on vise la transformation cela veut dire changer d’habitudes, et nous aimons bien nos habitudes. Le chemin du changement n’est pas facile, mais l’on peut apprendre à accompagner les équipes et les individus en route. Cela implique notamment d’appréhender la non-linéarité, c’est-à-dire que les choses peuvent s’empirer avant de s’améliorer, ou alors ne pas changer de façon perceptible au début et puis changer tout d’un coup quand on ne s’y attend plus.
Les nouvelles modalités d’organisation: la société toute entière doit se transformer pour relever les défis de notre époque, ce qui peut sembler insurmontable. Pourtant à l’échelle des organisations il est possible d’amorcer cette transformation, et la pensée systémique nous montre comment ces changements au niveau des organisations – d’ailleurs on parle de “sociétés” – ont le pouvoir de créer des mouvements de transformation plus larges. En s’inspirant des pionniers qui expérimentent de nouvelles formes de gouvernance, nous pouvons apprendre à œuvrer collectivement pour des sociétés plus heureuses.
Revoir les critères de succès
Si nous revoyons les modalités et les contenus de la formation, et visons non plus le transfert de savoir mais la capacité de transformation, il est nécessaire de revoir notre façon d’évaluer le succès d’une formation. A l’instar de l’état d’esprit de croissance, nous pouvons nous pencher sur le changement d’état d’esprit des participants, leur aptitude à innover et leurs capacités réflexives. En tant que formateur nous pouvons nous demander ce que nous avons appris nous-mêmes, car dans ce nouveau paradigme nous ne détenons pas le savoir et la vérité!
Pour qui?
Les leaders, mais pas que ! Souvent les postes de direction ont peu de temps à consacrer à la formation et sont aussi très imbriqués dans des structures de fonctionnement et de décision traditionnelles.
La transformation implique la contribution de différents profils et rôles dans les organisations, ainsi les collaborateurs motivés pour le changement peuvent tous être concernés : responsables innovation, développement durable, opérations, communication interne et externe, ressources humaines…
Conditions de réussite
Avoir un espace d’expérimentation, de mise en pratique, avec la capacité stratégique d’essayer autre chose – équipe projet, département… – mais pas trop déconnectée du reste de l’organisation sinon risque de choc des cultures
Une temporalité longue ; la transformation ne se fait pas en une nuit.
Une ouverture au développement personnel, car il est difficile de rencontrer la transformation sans se transformer un peu soi-même.
Pour aller plus loin :
School of System Change : www.schoolofsystemchange.org (formations et resources en anglais)
Institut des Futurs souhaitables : www.futurs-souhaitables.org (formations et resources en français)